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1 février 2016 1 01 /02 /février /2016 12:44

Notre politique de santé a un siècle de retard

L'espérance de vie a commencé à baisser aux États Unis depuis quelques années. C'est maintenant le cas en France. Elle avait déjà baissé en 2011, et à nouveau en 2015 : une baisse de 0,3 an pour les femmes et 0,4 an pour les hommes par rapport à 2014. Pourtant, on continue à nous faire croire que l'on vit et vivra de plus en plus vieux.

Si l'on y regarde de plus près, l’Insee faisait en 2012 le constat que « ces dix dernières années, la contribution la plus forte se fait entre 80 et 89 ans pour les femmes et entre 70 et 79 ans chez les hommes ». En clair : c’est l’espérance de vie des générations nées avant-guerre qui tire la moyenne vers le haut. Et cela ne va pas durer, car les générations suivantes sont en moins bonne santé pour de multiples raisons : changement de l’alimentation, pollution chimique, sédentarité, précarité...

En effet, depuis plusieurs décennies, les maladies chroniques dans tous les pays « développés » explosent.

En France, le meilleur indicateur est celui des affections de longue durée (ALD) publié par la Caisse nationale d’assurance maladie. Ce dispositif créé en 1945 prend en charge à 100 % les frais médicaux lorsqu’une personne est atteinte d’une maladie engendrant des coûts élevés. Depuis 1990, les maladies cardio-vasculaires ont progressé 5 fois plus vite que la population, le cancer 4 fois plus, les affections psychiatriques 3 fois plus, le diabète 6 fois plus (depuis 2000)... Or la mortalité des personnes en ALD, à âge et sexe identiques, est 2,9 fois supérieure à celle des personnes non ALD et 5,8 fois plus avant 70 ans.

Et le phénomène va sans doute s'accentuer considérablement. La pollution chimique a explosé au cours des dernières décennies. Les plus anciens qui ont eu une enfance préservée et qui n'ont été exposés aux polluants qu'à l'âge adulte ont plus de chance que les enfants qui grandissent et se construisent dans cet environnement dégradé. Car plus un enfant est jeune, plus il est sensible aux perturbations. Ainsi, l’exposition pendant la grossesse conditionne largement l’état de santé des futurs adultes. Le livre blanc publié à l’occasion de la troisième conférence « Programmation prénatale et toxicité », organisée à Paris en mai 2012 par la Society of Toxicology, conclut : « Beaucoup des grandes maladies et des atteintes fonctionnelles dont la prévalence a augmenté substantiellement au cours des quarante dernières années apparaissent être liées pour partie à des facteurs de développement consécutifs à des déséquilibres nutritionnels ou des expositions environnementales aux substances chimiques : obésité, diabète, hypertension, maladies cardiovasculaires, asthme et allergies, maladies immunes et auto-immunes, maladies neurodéveloppementales et neurodégénératives, puberté précoce et infertilité, certains types de cancer, ostéoporose, dépression, schizophrénie et sarcopénie ».

Alors, jusqu'à quel âge peut espérer vivre un nouveau né en France actuellement ? Rien ne serait plus faux que de penser qu'il atteindra l'espérance de vie actuelle. A ce propos, il faut remarquer que le terme d' « espérance » de vie est inapproprié pour parler d'une moyenne des durées de vie à un instant t.

Et enfin s'ajoute à cela le problème de la précarité : les pauvres sont en matière de santé aussi les plus fragiles, la paupérisation de la population va donc encore accentuer le problème. En France, le nombre de bénéficiaires de la CMU a progressé de 50 % entre 2007 et 2011, passant de 1,4 à 2,2 millions de personnes. Or, ceux- ci sont en moins bon état de santé que le reste de la population. Ils sont 1,8 fois plus nombreux, à âge et sexe identique, à être en ALD et avec une surmortalité de 50 % par rapport au reste de la population en ALD (2,5 % contre 1,8 %).

Bref, le tableau n'est pas rose, et le constat en a été fait lors de l’Assemblée générale de l’ONU, à New York, le 20 septembre 2011, dans une déclaration votée à l’unanimité des 184 chefs d’État et de gouvernement : « Nous, chefs d’État et de gouvernement […] reconnaissons que le fardeau et la menace que les maladies non-transmissibles représentent à l’échelle mondiale constituent l’un des principaux défis pour le développement au XXIe siècle », défi qualifié « d’ampleur épidémique ». Margaret Chan, directrice générale de l’OMS (l’Organisation mondiale de la santé), considérait à cette occasion « l’augmentation des maladies chroniques non-transmissibles comme une catastrophe imminente pour la santé, pour la société et surtout pour les économies nationales ».

Pourtant, en France, la récente loi santé ne fait rien pour s’attaquer aux causes environnementales des maladies. Le système de santé ne se remet pas en question. Pourtant, ce ne sont plus comme au dix-neuvième siècle les maladies transmissibles qui sont la plus grande menace. Il est temps de se rendre compte que la santé ne se résume pas au système de soin. Il faut une politique globale qui préserve notre santé environnementale, pour éviter les maladies plutôt que d'avoir à les soigner.

Et bien sûr, le coût des maladies chroniques est la cause majeure de la croissance des dépenses d’assurance-maladie. Mais les laboratoires pharmaceutiques sont florissants, donc tout va bien, non ?

Colombe

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